La réédition en 2023 du premier film de James Gray Little Odessa nous offre l’occasion de compléter dans le réseau des médiathèques la filmographie d’un des réalisateurs américains les plus doués de sa génération. Né en 1969 à New York au sein d’une famille d’immigrés ukrainien, James Gary a su tracer au fil de ses huit long-métrages un chemin unique, à la frontière du cinéma indépendant et des studios d'Hollywood. Les faubourgs de New York qui l'ont vu grandir, Little Odessa puis le Queens où il vivra toute son enfance, marquent fortement ses quatre premiers films de leurs empreintes. Gray se passionne pour les losers, « ceux qui ne se convertissent pas au rêve américain : les mafieux, les immigrés, les pauvres, les déclassés, ceux pour qui l'ascenseur social reste en panne ». C’est loin du clinquant Manhattan que James Gray brosse le portrait de personnages souvent tiraillés entre deux feux, plaçant le milieu dans lequel ils évoluent au premier plan. La famille, la mafia, la police sont de formidables champs d’action dans lesquels l'habituelle individualité du héros n’est qu’un prétexte. La question du choix (choix entre le bien et le mal dans La nuit nous appartient et The yards), choix entre deux femmes dans Two lovers, choix de la famille ou du milieu extérieur dans Little Odessa, font de Gray un des grands cinéastes de l’intime.